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Introduction à l'atelier

de Vision Sans Tête
(Ardennes, 1996)

Présentation du stage par Douglas Harding

 

 

Douglas Harding : Nous sommes très heureux de vous rencontrer, tous, et de nouveaux amis. Le fait de rencontrer de nouveaux amis représente quelque chose d’exceptionnel. Bienvenue spéciale aux nouveaux amis.

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Mais je crois que dans un certain sens, cela est toujours nouveau pour nous tous. Ce n’est pas quelque chose à laquelle on s’habitue, ou alors si on s’y habitue, c’est qu’il y a quelque chose qui ne va pas. Et dans un sens nous sommes tous des débutants. Nous sommes aussi des finalistes car nous sommes tous au but lui même, et tous au commencement également. Et toujours dans ces occasions, je me demande quoi dire au commencement. Je suis toujours obligé de tout reprendre à zéro et de me dire : « Qu’est ce que je fabrique ici à Ardenne ? » . Il faut que j’aie un regard neuf. Je regarde mes amis ici dans cette pièce, et quel spectacle fascinant c’est ! Tous ces visages…Et alors je me pose la question : « qu’est ce qui enregistre ces visages ? Qui est ce qui reçoit tous ces merveilleux visages ici ? Ces visages c’est ce que je regarde, mais qu’est ce qui regarde ? » Et quant à vous, vous êtes en réception de ces 4 visages, Alain, Richard, Catherine et Douglas. C’est en ce moment ce que vous regardez, mais ce n’est que la moitié de l’opération. L’autre moitié c’est qu’est ce qui regarde ce que vous regardez ? Nous oublions les règles de la condition humaine, du club humain auquel nous appartenons. Nous ignorons de regarder celui qui regarde . Ce qui est pire, c’est que nous superposons sur celui qui regarde toutes sortes de choses qui sont très bien à leur place là dehors, mais ces choses là n’appartiennent pas à ce lieu d’où nous regardons, c’est le contenu, c’est ce que nous regardons. Nous superposons ce qui est regardé sur ce qui regarde. Selon mon expérience lorsque le regardé et le regardant s’unissent, nous voyons ce qui se passe, et il s’agit d’être vraiment sincère à ce sujet . Lorsque nous tenons compte à la fois du regardé et du regardant, c’est la source de toutes les félicités. Et cette semaine nous allons partager avec vous toutes sortes de façons de rentrer à la maison, dans ce lieu que nous n’avons jamais quitté, le lieu à partir duquel nous regardons, le centre même de notre être qui est plus proche de nous que nos mains, nos pieds, notre souffle même. Voici mes pieds, voici mes mains, voici mon souffle, et qu’est ce qui est plus proche de moi que tout ça ? Eh bien, c’est ce qui regarde en moi, ce à partir de quoi je regarde. Et c’est cela le mystère, et c’est à ce sujet que nous nous trompons. Mais si nous revenons en ce lieu, c’est là que nous découvrons toutes les félicités.


Il y a un poète anglais qui s’appelle Lord Alfred Tennyson. Lord Tennyson a vraiment saisi la vérité, et c’est pour cela qu’il était un poète si merveilleux . Il a célébré cette vérité en ces quelques mots très simples : en parlant de Dieu il disait : «  Il est plus proche de moi que mon souffle, que mes mains, que mes pieds ». C’est celui là à partir duquel nous regardons, c’est Lui qui regarde en nous. Ce que nous allons faire cette semaine, c’est revenir sans cesse en ce lieu que nous n’avons jamais quitté et qui est plus proche de nous que nos mains, nos pieds, et notre souffle. Je crois que cela sera très vite clair pour vous que c’est là le lieu où nous sommes un . Ce lieu d’où nous regardons, c’est le lieu où nous ne sommes pas multiples, pas divisés, nous sommes un. Je crois que nous découvrirons peu à peu que celui là est celui qui ne périt jamais, que la mort ne peut pas atteindre ce lieu. La mort est toujours à bout de bras, à peu près à un mètre de nous. Et c’est un lieu que malheureusement nous avons appris non seulement à oublier, mais ce qui est pire à dissimuler en lui superposant toutes sortes d’absurdités. Nous ne regardons pas pour voir ce qui regarde en nous.


Eh bien, ce matin, nous allons regarder pour voir ce lieu. Comment allons nous regarder ce lieu ? Il s’agit de voir, c’est une méthode qui est basée sur la vision. Il ne s’agit pas de compréhension. Je crois que c’est très important de comprendre, la compréhension doit être basée sur des données, sur ce que nous percevons, et non pas sur ce que nous concevons. Alors si vous me dites : « Douglas, je ne comprends pas », je vous dirai que je ne crois pas que moi non plus je comprenne. C’est tout simplement enfoncé dans le mystère. Alors si vous me dites : « voir c’est très joli, mais je ne ressens rien, je n’ai pas de merveilleuses expériences mystiques », je vais vous dire : « Moi non plus. Simplement je vois cela et c’est tout à fait ordinaire, c’est tout à fait calme et tranquille. Rien d’extraordinaire ». Nous ne disons pas que les cloches du ciel qui sonnent, l’amour, la joie, tout ceci ne soit pas merveilleux. Bien sûr c’est merveilleux. Le problème avec ces choses là c’est que nous ne pouvons pas les provoquer à volonté. Elles vont et viennent selon la grâce de Dieu. Mais ce qui est toujours accessible, c’est de voir à partir de quoi je regarde, ceci est le roc sur lequel je peux fonder quelque chose de solide. C’est le roc sur lequel l’amour et la compréhension peuvent pousser et fleurir merveilleusement. Alors il faut être clair là dessus et ne pas penser que cette semaine nous aurons une expérience mystique extraordinaire. Bien sûr, si cela arrive, félicitations. Mais ça n’est pas le but. Le but ce n’est pas d’avoir une expérience de crête, parce que les expériences de crête, les pics, les sommets, il est très difficile de s’asseoir dessus, à un moment on risque de glisser d’un côté ou de l’autre. C’est une expérience de vallée. Cette vision de ce qui regarde en nous, c’est beaucoup plus une expérience de vallée. Vous pouvez vous asseoir dans une vallée, pas sur un pic. Il faut s’en souvenir.


Et une dernière chose dont nous devons nous rappeler sans cesse au cours de cette semaine : tout ce que vont dire Douglas, Catherine, Richard et Alain ne sont pas des choses que vous devez croire. C’est toujours quelque chose que vous devez vérifier par vous même. Lorsque nous avons rejoint le club humain, nous avons pris l’habitude de trop croire trop de choses, nous étions trop crédules. Nous avons cru toutes sortes de choses tout simplement parce que c’était pratique, et il fallait les croire. L’autorité, dans cette pièce, elle se trouve sur la chaise sur laquelle vous êtes assis, c’est l’unique autorité en ce qui concerne ce qui regarde en vous, vous êtes la seule autorité pour décider ce à partir de quoi vous regardez, ce qui regarde en vous.
Alors ce que je suggère, c’est de prendre au sérieux ce que nous vous proposons, mais c’est à vous de décider si c’est vrai pour vous.


En gardant toutes ces choses dans votre mémoire tout au long de cette semaine, je vais les résumer :


Tout cela concerne ce qui regarde en nous, ce que nous voyons, ce que nous percevons, et à ce stade là pas encore ce que nous sentons, ce que nous comprenons. Il s’agit d’établir la fondation sur laquelle les sentiments, la compréhension pourront fleurir, et c’est vous seul qui est votre autorité en ce qui concerne votre expérience.


Et ce que nous allons faire, c’est vérifier si ce qu’a dit Lord Tennyson, c’est à dire qu’Il est plus proche de moi que mes mains, que mes pieds, que mon souffle, si cela est vrai.
Et lorsque nous découvrons ce trésor, nous découvrons notre ressource. Nous sommes qui nous sommes, enfin. Nous vivons à partir de la vérité, et non plus à partir de mensonges. Tout ce que nous pourrions désirer, et bien plus encore, tout ceci nous appartient, parce que nous avons découvert notre véritable nature.


Ce n’est pas parce que nous le méritons, ce n’est pas quelque chose que nous réalisons, il ne s’agit pas de nous améliorer, ce n’est pas un stage d’amélioration personnelle. Il s’agit simplement de s’éveiller à ce qu’on est déjà, ce que chacun de nous est, même le plus stupide, le plus ignorant, le plus méchant, il est cela. Tous les êtres vivent naturellement à partir de ce centre, mais la plupart en sont inconscient.
Notre but c’est de nous éveiller à ce que nous sommes. Et paradoxalement, la révolution la plus importante de notre vie c’est de voir qu’il n’y a rien à changer, qu’il n’y a pas de révolution à faire.
Les expériences qui vont nous aider à retourner dans ce lieu que nous n’avons jamais quitté, la plupart de vous les ont déjà faites, eh bien nous allons les refaire. Moi comme Richard, nous avons fait ces expériences depuis de nombreuse années, une trentaine, et elles sont toujours nouvelles.
Vous n’êtes pas ce que vous paraissez être. Ce que vous paraissez c’est pour moi, et c’est merveilleux, mais vous n’êtes pas comme cela. C’est mon problème ce que vous paraissez être, c’est notre problème, nous nous en occupons de votre apparence ; je crois que vous allez découvrir que vous n’êtes pas ce que vos paraissez être.


Il y a plusieurs façons de découvrir ce que vous paraissez être. C’est par exemple de demander à un ami : « est ce que je suis bien coiffé ? est ce que mon nez n’est pas luisant ? ». Vous demandez cela à votre ami qui est là dehors. Vous lui demandez quelle est votre apparence. Une autre façon de voir votre apparence c’est de prendre un appareil photo, de le mettre là dehors, ou de le mettre sur un trépied, et de prendre une photo de vous même. De nouveau c’est à partir de là dehors. La troisième façon, c’est de tenir un miroir à à peu près un mètre de vous. C’est comme ça que vous découvrez votre apparence. Elle est là, dehors, dans un miroir, dans un appareil photo, dans les yeux de votre ami, du chien, du chat, là dehors. Mais ici ce n’est pas ce que vous paraissez être, ce n’est pas votre apparence, c’est ce que vous êtes. La grande absurdité, la grande tragédie, et j’y ai participé largement moi même, c’est de prendre ces apparences qui sont là dehors, celle du miroir, celle de l’appareil photo, celle de mon ami, de les prendre là dehors et de les ramener ici, de les coller ici. Eh bien ceci, je vous assure est une sorte de tentative de suicide. Je suis très sérieux lorsque je dis cela parce que celui que je regarde là dehors, combien de temps lui reste-t-il à vivre ? Lorsque je regarde celui qui est là dehors dans le miroir, je vois quelqu’un qui est en train de mourir. En fait, dans mon cas, il est en train de mourir depuis 87 ans. C’est une mort lente mais certaine. Mais je le mets ici, c’est absurde ! Et nous faisons tous cela, tous les membres du club humain font cela. Et alors nous nous demandons pourquoi nous avons des problèmes, des problèmes inutiles. Alors nous remettons cela à sa place. Votre apparence ne vous appartient pas à vous, elle nous appartient à nous. Ce qui vous appartient c’est votre réalité, cette réalité d’où vient cette apparence, ce qui est à la base de votre apparence. Nous sommes ici cette semaine pour faire sans cesse ce voyage depuis notre apparence jusqu’à notre réalité. Laissez votre apparence à sa place, c’est à dire chez les autres, dans leurs yeux, dans l’appareil photo, dans le miroir. Votre apparence se trouve à peu près à 1 mètre de votre réalité. On ne peut pas être plus concret, plus simple que cela ; Vous avez une apparence, et elle est très importante et très précieuse parce qu’elle est unique, mais elle n’est pas centrale. Votre apparence humaine est à à peu près 1 mètre de vous, 1 mètre de votre réalité. Alors laissons la à sa place, là dehors, nous ne la rabaissons pas, nous ne la dévalorisons pas. Alors nous devenons de véritables personnes. Notre réalité, qui nous sommes vraiment, est merveilleuse, au delà de tout entendement. Tous les grands sages, de toutes les religions, je parle des gens qui ont touché le cœur de ces grandes religions, je ne parle pas de tous les fonctionnaires des religions qui les entourent. Ils disent tous que qui vous êtes vraiment vraiment, c’est plus vous que cet être humain qui porte votre nom. C’est la réalité, et la puissance, et la gloire qui est derrière tout cet univers époustouflant, parce que elle est une, indivisible ; Ce n’est pas une étincelle de ce feu, un rayon de cette lumière qui est en vous, c’est ce feu tout entier, cette lumière toute entière, qui est ce qui regarde en vous, ce que vous êtes en ce moment.


Jadis on nous demandait de le croire et de l’accepter en confiance, parce que certains grands sages ou prêtres disaient cela. Ou bien si vous vouliez découvrir cela par vous même, il fallait que vous suiviez des disciplines très strictes, ou que vous contorsionnez votre corps de toutes les façons, et que vous méditiez dieu sait combien de temps, sans doute plusieurs vies, et alors vous aviez une vague chance de vois cela. Mais les plus grands de ces sages comme les premiers maîtres zen, comme Ramana Maharshi ont tous dit que c’est évident, c’est accessible maintenant. Et ça ne sera jamais plus évident, plus accessible que ça ne l’est maintenant, à 11h, à Ardenne, en cette seconde même, et totalement évident. Tout ce qu’il vous faut faire, c’est regarder au bon endroit.

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Douglas Harding

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