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Poésies

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​

 

Patrice Roy

​

Altimité

​

Je t'aime, toi présence discrète, limpide jusqu'à simuler l'absence.
Tu m'aimes, moi le chemin précieux pour explorer tes talents.
Nous aimons nous aimer, dans l’étonnement de notre nudité première.
Longtemps perdus dans la mosaïque réfléchissante du moi,
Je te découvre sans manière à l’orée d’une attention simple.
Tu me danses, je nous savoure, c’est le tango de l’altérité.
Oh ! précieuse folie des pôles changeants ;
Moi-tu-nous, toi-nous-moi, entre nous on se dit je.
Notre intimité est une tendresse d’avant les visages.
Je te chéris, ma vastitude silencieuse,
J’admire ta légèreté qui propulse des soleils joueurs,
J’aime nos joies sans raison croquant du mystère.
Les soirs où mes identités se font lourdes,
Je les ficelle de rubans colorés et les lance
Dans l’œil immobile qui se contient lui-même.
Je t’aime, toi l’invraisemblable présence
Qui ne ressemble à personne, libre de toute définition.
Nous aimons nous aimer en faisant semblant d’être deux.

Patrice Roy



 

José Le Roy

​

Je me suis cherché et je me suis trouvé
Et, ô surprise, je me suis perdu
Qui peut comprendre cela ?
Je me trouve en me perdant
Ô mystère, adorable mystère !

Ce que je suis, nul ne le sait
Car, unique, à qui pourrais je me comparer ?
Ma raison est maintenant dépassée
Comme la lumière d'une lampe en plein soleil
Et je ne sais plus rien.

Je suis un abîme et une cime
Je suis une ténèbre et une lumière
Je suis un point et un tout
Ou bien quoi ?

Entre Dieu et moi, nulle distance
Qui est le premier, qui est le dernier ?
Et je suis passé par delà toute connaissance.

Qui ? pas même cela.

José Le Roy


 


Le vrai m'est révélé en un regard
Au delà de toute parole
Le Bien alors remplit mon coeur
Et tout mon visage
Est comme une main qui s'ouvre
A l'infini beauté des êtres.

José Le Roy



 

Richard Boyer

​

L’émoi du moi

un poème de Richard et Bantcha

​

Mon unique souffrance
Est de ne pas être moi ;
De sentir, parfois,
Un décalage
Entre ce que je suis et moi.

Ma souffrance résulte de ce décalage.

Mon unique souffrance est de ne plus me sentir un.
Ne plus me sentir un est mon unique souffrance.

Le remède ?

Redevenir un.
Redevenir moi.

Moi – Un

Comme lorsque j’étais enfant.

Enfant,
Je percevais le monde sans en être le centre.
J’étais le monde.
L’éclair de la vérité
M’a rendu aveugle,
Il a fermé mon œil unique,
Mon œil magique.

Et depuis lors je vois
Avec les deux yeux de l’autre.
Je me crois né dans le monde
Autre que moi.
Car me voilà deux moi depuis :
Moi-moi et moi-autre,
Un « moi-un »
Un « moi-deux »

Un moi-un du côté de moi
Un moi-deux du côté du monde.
Un moi, un en deux
Deux moi, deux en un.

En vérité
Je suis le roi du paradoxe.

Ma main droite brandit
Le sceptre de la dualité.

Dans ma main gauche
Repose la coupe de l’unité.

Sur mon absence immémoriale de tête
Resplendit la couronne incréée
Du Rien-Tout souverain.

Je suis le roi du paradoxe.

Parfois j’en ris,
Parfois j’en pleure.

J’en ris du côté du un,
J’en pleure du côté du deux.

Du côté du un
Je suis fasciné par le deux
Et je m’y perds.

Du côté du deux
Je suis aspiré par le un
Et je m’y trouve
M’y perdant.
Ainsi, moi, je suis.

Et l’autre dans cette histoire ?

Ce qui me touche en l’autre
Est l’écho
De cette même unique souffrance.

L’autre ?
C’est très simple :
Un + deux = toi.

L’autre ?
Il est exactement dans la même situation
Que moi.

Comment pourrait-il y avoir
Deux moi ?

L’autre
C’est moi,
Moi-deux à nouveau,
Moi dans le moi-deux,
Dans le moi-doute,
Dans le moi qui doute de moi.

Sans doute
Il n’y a plus que moi
Moi en tout
Moi en moi partout.

Moi
Sans aucun autre moi
Que moi.

Richard Boyer




 

Aux amis de « St Guillotin », alias Douglas Harding


Ultime rire

AH ! AH ! AH !
Sacré Douglas !
Tu m’as bien eu
Tu m’as coupé la tête.

A présent : la VUE
Claire, sainte, inobstruée.

Que m’importe aujourd’hui
De voir les Dieux
Les anges de lumière
Les saints.

Que m’importe aujourd’hui
De boire le Soma
D’être instruit par les plantes maîtresses :
Ayahuasca, Peyolt, Santa Rosa.
Le Cerf, la Reine des Serpents :
Leur cortège de totems sublimes
D’explosions de couleurs
D’archétypes enchanteurs
Les visions fabuleuses
L’envol de l’énergie.

Que m’importe aujourd’hui
De voir l’aura
Les mondes parallèles,
Les maîtres, les grands initiés,
Bouddha, Christ, Kalhi.
Tous :
Têtes coupées, têtes coupées, têtes coupées.

Rien !
Que reste-t-il ?
De mon existence :
Peu de chose, mort presque
Rien de moi !
De la vie :
Des myriades de formes changeantes
Se déployant dans ma vue, dans mon cœur
Tout en moi !

Mon cœur ?
Autrefois, roche contractée, obscure, absurde.

Puis le feu,
L’embrasement interne
L’inouïe consomption de la vue.
Enfin, le joyau dans la rose
L’éclosion.

A présent :
Mon cœur est l’immensité
L’immensité est mon cœur.

Ici
La vie naît
Maintenant
Se recrée et se déploie
Instant après instant
Dans le cœur
Du voyant unique
Je Suis.

J’ai résisté tant que j’ai pu
Tout fait, hélas,
Pour éviter la mort.

Avec elle,
A présent :
La Vue
Claire, sainte, inobstruée.

Tu m’as coupé la tête
Tu m’as bien eu
Sacré Douglas !
AH ! AH ! AH !

Richard Boyer




 


Courtisan de l’Espace

Prompt à m’allier le ciel
A m’y noyer, à m’y dissoudre,
J’ai un amour,
Un amour fou,
Incandescent,
Que je courtise, secrètement.


Je suis tranquille, tranquille,
Cet amour-là,
Rien ne peut me le dérober.
Rien ni personne.
Cet amour-là,
Il est si vaste qu’en l’épousant
Je disparais,
Puis je renais,
Dans l’instant même je renais :
Immensité, immensité.


Courtisan de l’espace,
Je suis amoureux fou du ciel.

​

O ! ma divine folie,
J’aime le vide, j’aime l’espace,
J’aime me perdre
En mon amour.
Car mon amour
Est le « je suis »,
Le pur « je suis »
De tout mon être,
La source unique,
La clarté,
L’immensité plus que parfaite.

 

Courtisan de l’espace,
Semblable au ciel qui tout embrasse,
Je suis si vaste, si léger,
Nul passé ne peut plus faire poids.
Mes peurs se perdent en mon infinitude.

Plus rien ne pèse,
Tout sourit.

 

Bonheur, bonheur tant désiré
Je suis le roi de ton royaume.

 

Plus rien ne pèse,
Le monde entier s’épanche en moi,
Spontané,
Sans plus faire résonner
D’autres échos en mon cœur
Qu’un émerveillement renouvelé

Et la vie se déploie
D’instant en instant neuve,
couverte à jamais de l’originelle rosée,
En l’œil spatial et libertaire
De mon amour l’immensité.



Richard Boyer

 



 

Jean-Paul Inisan

​

Masque blanc

​

Ma conscience est sans visage
Elle ne cherche pas son âge
Elle est comme un matin
Qui n’a pas de fin

Elle est comme la lumière
Qui elle-même s’éclaire
Elle n’a pas de mots
Pour dire ce qui est le bien ou le beau

Car il n’y a rien sous le voile
Que l’infini et ses étoiles
L’éternité du maintenant
Dont Vous est le seul élément

Car c’est ainsi qu’est votre évidence
C’est mon existence qui danse
Quand je Vous regarde avec amour
Sans attendre une image en retour

Colère tristesse ou allégresse
Ne sont alors jamais à mon adresse
Mais comme de libres fleurs
Qui puisent leurs parfums dans mon cœur

​

par Jean-Paul Inisan



 

Frédéric G. Whytlaw

​

ICI ET LA

 

Comme le regard porte


Sur le bord d'une feuille
Se balance lentement


Assis
Au vent du soir


Je suis
Tout à la fois
L'arbre
Et la plaine
Et le ciel


L'oiseau



 

STRUCTURES

​

Comme l'organique
Du plus loin
La sculpture S'organise.

 

C'est dès le sable
Que germe l'ombre
Que gît la forme.

 

Tout est déjà là.

 

Et qui attend
Un coup de main
Ou un coup d'œil.

 

Un coup d'éclat.
Un coup de foudre.
Un coup de grâce.



 

PRESENCE (S)

​

Cette pierre

 

Cet arbre

 

Cet oiseau

Ce passant

L'AI-JE BIEN REGARDE ?



 

BONNE FORTUNE

 

Bien

De ce monde

JE SUIS

Celui

qui contemple

s'émerveille.

​

LA JUSTE ATTITUDE

​

Comment dire
Ce qui
Est
Et recevoir
En face
La lumière
De chaque instant ?

Plus juste
Et plus
Fidèle ?

Etre, là.
Sans mémoire
Et sans pli.
Juste
Un peu en retrait
Et pourtant bien
Présent
Dans
La juste attitude...

Aimer

Connaître

Se découvrir
Connu.
Se découvrir
Aimé.

Solitaire
Et
Simplifié.

Nu.

Enfin prêt
Pour l'étreinte.



 

Jean-Christophe Sekinger

​

quand je parle de certaines choses
je sens se plisser mon front
puis je vois mon visage s'ouvrir, ses contours disparaître
sans explosion, avec prudence et douceur

comme pour approcher cet oiseau minuscule et ébouriffé, il faut
prudence
et douceur.
d'un battement d'aile il s'enfuit comme se ferme mon visage
mais je sais qu'il est toujours là, sur une branche ou sur une autre
question de confiance.

mon visage s'ouvre grand et se ferme
disparaît et s'étend infiniment puis se ferme
coquillage avec une perle dedans
coquillage vivant

Je pourrais croire que cette route a quelque chose de spécial, cette
route déserte que j'emprunte chaque après-midi. Comme ces chemins
secrets qui partent d'entre deux arbres. Je me dandine sur la chaussée,
je vais chercher ma fille. Est-ce le grand chêne et l'odeur poivrée de
ses feuilles mortes? le lotissement aux maisons en construction?
l'odeur
de fumée de bois? le ciel (il me semble plus vaste ici qu'ailleurs)?
est-ce le vent? la poussette vide, mes mains qui la tiennent et mes
bras
qui remontent vers... vers...?

 

 

 

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